Ségolène Royal veut dépasser le PS... On voit bien la tactique, la même que celle des primaires internes de 2006, se faire plébisciter par l'opinion et s'appuyer sur un matelas de voix conséquent pour aller au premier tour... mais le fond?
Inviter Sarkozy à mettre en accord ses paroles (pour le G20) et ses actes (bouclier fiscal intouchable), c'est de bonne guerre, mais passer aux actes sans programme rassemblant largement les forces politiques de la gauche et le mouvement social revendicatif, ce n'est pas aussi simple... Et pour l'heure c'est bien le PS et sa première secrétaire qui ont lancé l'idée.
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Nous reproduisons ci-dessous un CR de la fête de l'Humanité, rédigé par une des composantes du Front de gauche... L'unité est un combat, mais à ce point?
Car en dehors d'une réglementation du capitalisme qui est dans le programme socialiste et a été rappelé par Martine Aubry, que nous proposent ceux qui n'entendent pas construire une plate-forme avec le PS?
L'anti-capitalisme est un slogan pour mobiliser, mais ce n'est pas une alternative. Un système de production a toujours quelques siècles de vie et se transforme progressivement avant qu'on puisse constater précisément qu'il a changé de nature.
La propriété collective des moyens de production avait créé un capitalisme d'Etat au fonctionnement a-démocratique en matière de choix stratégiques de développement. Le système coopératif ne se dispense pas de technostructures qui fonctionnent aussi pour elles-mêmes...
L'expérience en France d'un secteur public nationalisé très important, a permis avec la planification, "ardente obligation", le pilotage centralisé de la reconstruction de l'économie nationale et l'établissement du modèle actuellement sapé par la droite.
Il serait très exagéré de dire qu'il avait constitué également un exemple de démocratie interne dans sa gestion et certains ont même théorisé sur son orientation au service du capital privé...
Renationaliser ce qui a été privatisé ou re-privatisé depuis plus de 20 ans est certes possible mais, vu l'état des Finances publiques, cela donnerait lieu à une expropriation sans indemnisation ou au mieux à la distribution d'obligations à taux fixe... On peut imaginer que l'actionnariat en France étant ce qu'il est, avec la présence d'investissements étrangers en particulier dans les entreprises du CAC 40, cela ne manquerait pas de surprendre l'opinion, nos voisins et alliés et quelques fonds souverains ... L'autarcie serait-elle un idéal ? Mais pour qui?
Alors en attendant mieux, vive la social- démocratie... et merde à Vauban! JPB
Après la fête de l’Humanité…
La Fête de l’Humanité qui s’est tenue le week-end dernier a été non seulement un succès impressionnant en termes de participation, elle a été également traversée par des débats politiques exigeants sur les perspectives de la gauche de transformation sociale. Cette fête constitue en cette rentrée un contrepoint revigorant aux réunions qui se sont tenues fin août à la Rochelle et à Marseille où il était question essentiellement d’alliance avec le Modem, de Primaires… Alors qu’au parc de la Courneuve, c’est la question de la construction d’une véritable alternative à gauche, qui soit capable de redonner espoir aux salariés et aux jeunes, qui a été au centre des débats.
Il faut dire que la gauche de transformation sociale est aujourd’hui au pied du mur. Soit elle arrive à poser les bases d’une construction politique durable face à la crise de la gauche actuelle, soit elle risque de se retrouver écrasée et marginalisée dans la société française, prise en tenailles entre deux processus qui asphyxient peu à peu le champ politique.
La droite après la « rupture »
D’abord la droite sarkozyenne est déterminée à poursuivre les contre-réformes mises en œuvre par le gouvernement, à gagner l’élection présidentielle de 2012 en resserrant l’unité de la droite (alliance avec de Villiers et Nihous) tout en poursuivant de façon permanente l’ouverture à gauche. Elle veut surtout faire du « moment politique de 2012 » un point d’aboutissement du remodelage de la société française mis en œuvre ces dernières années. En 2012, la droite ne fera pas campagne sur la « rupture » avec un certain « modèle social », comme en 2007, mais en imposant son propre « modèle de société » comme cadre du débat. C’est pourquoi l’UMP a engagé, dans cette perspective, un approfondissement du travail de « dépoussiérage idéologique » entrepris ces dernières années.
C’est le sens du rapport publié par Hervé Mariton en juillet 2009 intitulé « Reprendre la main sur les questions de société ». Ce document décrit une véritable méthodologie politique pour gagner l’hégémonie dans la société sur ces questions (la famille, l’éducation, l’individu, la place de la science…), construire de véritables consensus en s’appuyant sur des forces de la société civile pour faire progresser l’idéologie libérale, mener une bataille systématique sur les « valeurs », sans se faire piéger dans la position d’une « droite réactionnaire tournée vers le passé » qui serait réticente au mouvement.
Le « pôle démocrate » en recomposition
Face à cette évolution, il est évident que l’évolution du Parti Socialiste vers une alliance permanente avec le MODEM constitue un effet profond de la réorganisation du champ politique, du brouillage du clivage gauche/droite et de la confusion des valeurs qui s’est considérablement approfondie ces dernières années. En cette rentrée 2009, la « mutation du PS » en un parti démocrate, de centre gauche, qui était jusqu’à présent un processus essentiellement analysé par quelques observateurs à gauche, est devenue un phénomène perçu à grande échelle, et qui est entré dans sa phase de travaux pratiques.
Ce n’est plus seulement Ségolène Royal qui défend – en briseuse de tabou – l’alliance au centre ou de « petites expérimentations locales » comme aux municipales de 2008, l’alliance au centre est désormais une question qui ne paraît plus remise en cause par personne à la direction du Parti Socialiste (à l’exception d’Henri Emmanuelli). Aubry va même jusqu’à déclarer à propos de François Bayrou au journal Le Parisien du 17 septembre 2009 : « J’accepte volontiers de le rencontrer pour discuter de ses propositions. Vous savez lui et moi, nous nous connaissons depuis longtemps, il est béarnais, je suis basque… cela peut créer des liens ! ». Les négociations entre les trois pôles du centre gauche « PS - Verts - Modem » sont engagées publiquement pour les régionales de 2010. Et à cela s’ajoute la présidentialisation aggravée du PS telle qu’elle va se réaliser à travers le processus des Primaires.
Cette évolution, mise en œuvre habilement par Martine Aubry, est favorisée par la proximité idéologique entre dirigeants socialistes et libéraux modérés, une commune vision du monde dont le discours d’Aubry à la Rochelle a donné une nouvelle illustration. Face à la crise systémique du capitalisme, la première secrétaire du PS en appelle à une « offensive de civilisation » qui vise la mise en place d’un « capitalisme régulé », d’une concurrence un peu moins violente, avec des banquiers et des spéculateurs un peu moins à la recherche du profit maximum… C’est ce positionnement sur le fond du PS qui rend possible sa mutation en parti de centre gauche.
Construire une nouvelle gauche
Dans cette situation, la responsabilité des forces de la gauche de transformation sociale, et en particulier des formations du Front de Gauche, est immense. Face à cette crise profonde, durable, existentielle, de la gauche, notre ambition doit être de construire une véritable nouvelle gauche, porteuse d’une perspective de rupture avec le capitalisme et d’une stratégie majoritaire. Si nous voulons réellement contester l’hégémonie du social-libéralisme et de la ligne démocrate sur les classes populaires, nous ne devons pas chercher à occuper le seul espace de l’extrême gauche, mais à convaincre et à entraîner tous ceux qui refusent cette disparition d’une véritable gauche de transformation sociale dans ce pays.
De ce point de vue l’année qui vient va être décisive, et ce sont ces questions urgentes qui ont dominé les débats de la Fête de l’Humanité. Pour Gauche Unitaire, l’échéance des prochaines élections régionales doit permettre de concrétiser ce rassemblement des forces de gauche, par des listes autonomes du Parti Socialiste. Les débats sont ouverts dans les formations de gauche, et en particulier au sein du PCF qui doit organiser en octobre 2009 une consultation de ses adhérents sur le choix entre autonomie ou alliance avec le PS.
Il convient de mesurer l’ampleur des basculements en cours. Entre le rassemblement des forces de gauche en autonomie du PS et la participation aux attelages PS-Modem-Verts, il n’y aura probablement pas de troisième voie. La raison de fond de cette évolution, c’est l’abandon par les dirigeants du PS de la stratégie « d’union de la gauche » qui était constitutive de l’identité du PS depuis le congrès d’Epinay en 1971. Plus précisément, l’union de la gauche n’est maintenant vue par eux que comme un éventuel complément, un moyen de peser dans les négociations avec le centre droit. Le traitement médiatique de la Fête de l’Humanité, qui a été célébrée comme les retrouvailles du PS et du PCF, l’illustre parfaitement. Le rassemblement à gauche n’est pas présenté comme contradictoire avec la stratégie d’alliance au centre, mais comme un des passages possibles pour aboutir à une « grande coalition ». L’interview de Martine Aubry au journal Le Parisien, quelques jours après la Fête de l’Humanité,donnait la clef de cette séquence.
Une difficulté du débat actuel provient du fait que nombre de conseillers régionaux communistes se battent depuis des années, au sein des majorités gérant ces institutions, pour porter des exigences de gauche. L’enjeu de constituer des listes autonomes face au PS n’est pas une négation ou une remise en cause du travail réalisé par les élus régionaux du PCF ou encore ceux du Parti de Gauche au sein des majorités avec le PS (les débats nécessaires quant aux mesures mises en œuvre par les Conseils Régionaux ne sauraient prendre le pas sur le constat évident que la gestion par la gauche est substantiellement différente de celle mise en œuvre par la droite). Il s’agit plus fondamentalement de pouvoir exister politiquement, en tant qu’acteur autonome, sans se voir réduit à n’être qu’une nuance de plus d’une coalition arc-en-ciel, comme l’illustre la trajectoire de Robert Hue.
Enfin il faut regretter que dans le débat qui a traversé la Fête de l’Humanité la question de la relation au PS soit apparue trop souvent fort embrouillée. Parce que notre ambition est de reconstruire une gauche qui rassemble tous ceux qui cherchent une véritable alternative, autant la clarté est indispensable quant au fait que cette reconstruction ne saurait inclure le Parti socialiste (et donc qu’il ne saurait y avoir de « plate forme partagée » entre le PS et le Front de Gauche), autant il ne serait pas raisonnable d’ériger en principe le refus de « s’adresser » au PS et de débattre avec ses militants. Face à la mutation démocrate du PS mise en œuvre par M. Aubry et à l’état actuel de la gauche, le désarroi de nombreux militants et électeurs socialistes ne cesse de s’accentuer. Après la rupture courageuse de Marc Dolez et Jean Luc Mélenchon en novembre 2008, il est tout à fait possible et souhaitable que d’autres forces militantes cherchent une issue à l’évolution catastrophique de leur parti.
C’est pourquoi, s’il est évidemment pas question de co-organiser entre les forces du Front de Gauche et le PS des « Ateliers sur l’alternative » pour définir une « plate forme partagée » - tout comme personne n’envisage d’ouvrir les groupes de travail sur les régionales au Parti Socialiste - il est indispensable, nécessaire et naturel (à moins de céder au sectarisme il est vrai sans cesse résurgent dans le gauche) de saisir toutes les occasions pour débattre, confronter les arguments avec les dirigeants socialistes. La confrontation entre les deux grandes orientations qui existent à gauche, entre une logique d’adaptation et une logique de rupture avec les politiques néo-libérales est une nécessité permanente pour les militants, aussi bien pour ceux du Front de Gauche qui doivent être offensifs sur leurs idées que pour ceux du parti Socialiste qui s’interrogent et hésitent.
Tenir la feuille de route du Front de Gauche
Ces débats sont légitimes mais ils ne doivent pas ralentir les initiatives que peuvent prendre les forces de la gauche de transformation sociale et en particulier le Front de gauche. Celui-ci, composé du PCF du PG et de la GU, et qui pourrait d’ores et déjà s’élargir au groupe République et Socialisme, parce qu’il a connu un succès limité mais réel aux dernières élections européennes, porte la responsabilité de faire des propositions pour l’ensemble de ceux qui cherchent une alternative à gauche.
Les positions adoptées par la Fédération pour une alternative sociale et écologique et les Alternatifs témoignent qu’un élargissement est possible. Le NPA est amené à affronter des questions qu’il récusait hier. Une dynamique positive d’élargissement et d’ancrage du rassemblement d’une gauche de transformation sociale se dessine donc, c’est une chance qu’on ne saurait gâcher.
Le communiqué commun du PCF, du PG et de la GU du 16 juillet dernier donnait une feuille de route claire au Front de Gauche :
1) Initier des « campagnes d’urgences (…) autour des actions permettant de mieux faire connaître et partager les trois propositions de lois déposées par leurs parlementaires pour les salaires et l’ensemble des revenus, pour l’interdiction des licenciements dans les entreprises qui versent des dividendes aux actionnaires, pour la défense et le développement des services publics; ensuite pour travailler les convergences nécessaires à construire pour le droit et le financement des retraites dès l’âge de 60 ans et enfin pour la préparation du sommet de Copenhague sur le réchauffement climatique. »
2) « Ouvrir un grand chantier public de construction de cette alternative en s’adressant à toutes les forces, à toutes celles et tous ceux qui partagent et qui voudront participer à cette démarche. (….) Les formes de cette élaboration mêleront le travail entre les organisations qui souhaitent s’impliquer dans la démarche du Front de Gauche, les auditions nécessaires et les initiatives publiques - dans l’esprit du forum débat tenu à la mutualité le 3 juillet : « trois heures pour une alternative de gauche » - permettant d’associer l’ensemble des citoyennes et des citoyens qui le souhaitent à cette construction : syndicalistes, responsables associatifs, personnalités du monde de la création et de la recherche. »
3) « Ouvrir un groupe de travail sur les prochaines échéances régionales. Ce groupe de travail aurait pour fonction de conduire, une réflexion sur les contenus à même de créer les conditions d’un rassemblement à vocation majoritaire porteur de mesures solidement et réellement ancrées à gauche. Il serait proposé aux partis qui s’y sont déjà déclarés favorables, qu’ils se retrouvent ou pas au sein du Front de Gauche et plus largement aux forces qui se reconnaîtront dans un tel projet. »
De toute évidence, ces trois exigences sont plus que jamais d’actualité. Travaillons à les concrétiser !
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