Il s'agit de réflechir à des sujets et des faits d'actualité, liés aux élections de 2007, à partir des concepts de république, de démocratie, de socialisme, de légitimité et de citoyenneté.
L'avance prise par le parti du président élu au premier tour des législatives s'accompagne d'un taux anormalement élevé d'abstention. Il faut donc se reposer la question de la légitimité politique: n'a-t-on pas dit que la participation très forte à l'élection présidentielle rajoutait du poids à son vainqueur? Qu'il fallait y voir un regain démocratique? Las, que dire alors cette fois? Que les élections se suivent et ne se ressemblent pas?
La doxa médiatico-manipulatrice a dès le résultat de la présidentielle, mis en avant dans de nombreux sondages que les électeurs confirmeraient la nouvelle majorité (en fait la même, on reste à droite, non?); les électeurs ne se déjugeraient pas à un mois d'intervalle, la logique de l'inversion de calendrier et le raccourcissement du mandat de l'hôte de l'Elysée ayant de fait induit une présidentialisation des institutions; soit.
On en conclura d'abord que cette modification constitutionnelle ne fut pas une manifestation évidente de génie politique; il est vrai qu'en France le cumul des mandats ne choque qu'une minorité d'élus ou de citoyens aussi bien dans la durée que dans la diversité, alors le renforcement d'un exécutif déjà très pesant...
Il paraît bien inutile de rappeler la formule de Montesquieu, qu'il n'y a point de constitution là où n'existe pas de séparation des pouvoirs. Et c'est précisément cette absence qu'a confirmé ce nième avatar de la constitution de 1958.
Même avec les promesses du président actuel de redonner du pouvoir au parlement; comment croire d'ailleurs que dans une démocratie un homme ait la faculté de donner du pouvoir à la représentation nationale? Personne pourtant n'a eu l'air de trouver la formule parfaitement contradictoire!
La légitimité du parlement est bien en cause: l'abstention massive peut signifier que l'acte politique majeur est l'élection du président et qu'en tout état de cause, les députés font ce que leur demande la président ou l'Europe! Quant au Sénat!
Les citoyens toléreraient donc un système politique totalement déséquilibré et irréformable, puisqu'on a du mal à imaginer que les élus acceptent de voir réduire et recentrer le champ de leur "compétence". L'exécutif, dans la gestion des rapports de force qui caractérise son action ou sa gouvernance, n'a aucun intérêt à court ou moyen terme à changer véritablement la nature des relations entre la présidence, le gouvernement et le "corps législatif"; l'expression a un côté vieillot, mais c'est volontairement que nous renvoyons le lecteur à une époque où le peu de poids des élus ne s'accompagnait pas de discours ronflants sur la liberté, l'égalité et la démocratie!
Peut-être apparaîtra-t-il à certains qu'il est irréaliste de penser à un travail constitutionnel sérieux; pourtant, outre que même une allusion du nouvel élu sur des inflexions à peu près "cosmétiques" indique que le problème est réel, une comparaison avec les équilibres institutionnels d'autres démocraties européennes ne donne pas de la patrie des droits de l'homme et de l'idée de république une idée avantageuse. La Russie n'est pas franchement un modèle de démocratie mais les pouvoirs de notre président sont plus proches de ceux de Vladimir Poutine que de ceux de Georges W.Bush ou de tout chef d'Etat ou de gouvernement de l'Union européenne! Il est singulier que les média aient oublié cette éclairante comparaison; l'expérience historique montre que le pouvoir corrompt et que le pouvoir absolu corrompt absolument.
Un autre oubli ou presque, des media dans les commentaires de ce premier tour: le découpage actuel des circonscriptions remonte à 1986, Charles Pasqua officiant alors place Beauveau. Le découpage avait été pratiqué à partir du recensement de 1982; il y en a eu deux depuis lors et malgré les remarques du Conseil constitutionnel sur la nécessité d'un rééquilibrage au nom de l'égalité des citoyens devant le suffrage, rien n'a été entrepris. L'Angleterre de 1830 avait ses "bourgs pourris", la France de 2007 a des circonscriptions scandaleusement inégales. Combien de temps encore pense-t-on qu'un tel système est tolérable? Dimanche prochain, les vrais citoyens devraient avoir tout cela et d'autres choses encore, présents à l'esprit.
JPB