Si les débats de Reims et les votes des militants n’avaient eu pour but que de mettre toute l’énergie disponible sur la préparation de l’élection présidentielle de 2012, alors les militants, les adhérents et même les groupies auraient été bernés.
Cela marquerait une absence totale de respect pour la sincérité de leur engagement, une singulière ignorance des péripéties du mouvement social, un oubli des conditions historiques et un éloignement considérable par rapport aux préoccupations des Français confrontés, comme d’autres peuples, à la nième crise du capitalisme mondialisé.
L’avalanche de considérations sur la difficulté de la tâche qui attend la nouvelle première secrétaire, les conseils empressés sinon désintéressés qui lui sont prodigués mettent en évidence que les contre-feux pour empêcher une évolution du parti, non pas vers une « modernisation » sans principes, mais vers une efficacité « politique » retrouvée sont allumés.
Il ne faut pas manquer d’humour ni du sens de la dérision, quand on prend la peine de lire les éditoriaux ou les expertises de certains journalistes ou politologues dont l’engagement auprès d’un PS porteur des espoirs du peuple de gauche aura depuis longtemps échappé à plus d’un !
Sauf à penser que prôner le rôle d’opposition de Sa Majesté vaut adhésion !
Les urgences et d’abord le bilan
Il convient d’abord de ne pas oublier que depuis 2007, la majorité la plus pernicieuse de la Vème république a entassé réformes antisociales sur réformes liberticides et que la première parole publique du parti doit être l’annonce que tout ce qui est mal fait et tout ce qui fait mal sera remis à plat et défait.
Il est singulier, sinon inhabituel, de voir le gouvernement faire semblant de ferrailler avec la commission de Bruxelles à propos d’une aide à 6 banques en bonne santé, alors qu’en l’occurrence, la commission est dans le droit fil des traités, y compris le dernier, imposé à la hussarde et contre le peuple. Origines hongroises et présidence tournante de l’Union, n’expliquent nullement cette hâte et cette méthode.
L’accord de fond sur le libéralisme est la cause première de cette ratification, alors même qu’au moment où elle fut perpétrée par un Parlement trop heureux de s’affranchir d’un mandat populaire ou prétendant que l’élection du nouveau président valait approbation de tous ses choix, la crise des subprimes et ses premières conséquence étaient non seulement connues des gestionnaires financiers compétents, des observateurs expérimentés et des politiques honnêtes depuis plusieurs mois ; la crise et donc sa cause !
Ainsi donc à la faveur d’une crise imputable à un libéralisme débridé, on prétend permettre non seulement au système de continuer comme avant, à quelques ajustements cosmétiques près, mais encore de faire fructifier ses propres errements, sur le dos des contribuables ordinaires et des salariés, actifs et retraités.
La réapparition de l’Etat, modo Sarkozy ne vise pas à satisfaire les besoins de la population et de répondre à l’intérêt général, mais de maintenir voire d’aggraver l’inégale répartition de la plus-value, en permettant à quelques entreprises ou investisseurs d’engranger des acquisitions nouvelles, y compris dans des parts jadis ou naguère propriétés de l’Etat !
Le parti a justement dénoncé le bouclier fiscal qui a privé de ressources l’Etat et a donné lieu à la remarquable, quoique parfaitement indigne pantalonnade du financement du RSA ; cela oblige donc à avancer des propositions nouvelles en matière de fiscalité, y compris sur le terrain idéologique, et au moins aussi loin que le démocrate Obama !
Cela oblige à remettre au premier plan la question des services publics, y compris dans le cadre européen et en particulier dans la gestion des réseaux de communication, de transport, d’énergie et de distribution et traitement de l’eau.
Le financement des infrastructures, à l’échelle de notre pays comme du continent, relève de garanties et d’investissements publics. Autoroutes comprises !
Il est donc temps d’affirmer que « Non, la Poste ne sera pas privatisée » et qu’au besoin, elle serait renationalisée, puisque son statut de société, a cessé d’en faire une administration publique. Une erreur du passé ?
Il est temps de songer aux problèmes à venir pour la santé publique si les plans destructeurs de l’hôpital public entrent en application et si les principes fondateurs de la Protection sociale continuent d’être méticuleusement remis en cause.
Enfin, il faudra bien se résoudre à lire les réformes en cours sur l’éducation nationale, la recherche et l’Université pour ce qu’elles sont : désengagement public, renforcement du privé, baisse et sélectivité de l’offre de formation, refus d’un projet cohérent d’élévation générale des qualifications dans notre pays, y compris en pensant aux conditions objectives dans lesquelles s’exerce la concurrence ; le tout mâtiné d’un renforcement de l’autoritarisme de hiérarchies locales et d’un affaiblissement du paritarisme au nom d’un dialogue social aussi souvent annoncé que refusé dans les faits.
Ce gouvernement ne fait pas des réformes pour enrichir la France et contribuer au bonheur des Français ; il veille à tailler dans le corps vivant de la nation une société plus conforme aux intérêts à court terme de quelques-uns, en trompant les autres, ses électeurs compris.
Démocratie et libertés
Le corps social est cependant parfois rétif et dans la remise en cause du contrat social, les libertés publiques sont un obstacle à abattre.
Sarkozy ministre de l’Intérieur avait imposé à son prédécesseur, roi fainéant, aux potiches Gardes des sceaux et à un Parlement sans activité législative propre des lois de plus en plus répressives ; devenu président, avec une Garde sortie du rang, il a accentué encore cette dérive sécuritaire peu respectueuse et encore moins ménagère des droits de l’homme.
Alors que la France est régulièrement mise au pilori par la cour européenne des droits de l’homme ou la cour de justice européenne de Luxembourg, à cause de la durée trop longue des instructions et procédures, à cause de l’état honteux de prisons insalubres, surchargées et criminogènes, à cause de l’insuffisante séparation des pouvoirs, les lois votées ont négligé totalement ces avis et ces condamnations et ont ajouté peines- planchers, risque de récidive, pénalisation des malades mentaux, abaissement de l’âge de la responsabilité pénale, mise ne cause des juges pour enfants…
Le tout nonobstant Outreau et les excès ahurissants d’une magistrature incontrôlée parce qu’auto-contrôlée, vrai refuge du vrai corporatisme, d’autant plus dangereux celui-ci, que contrairement aux fonctionnaires auxquels on en fait généralement reproche, les magistrats, eux, ont du pouvoir, ou au contraire soumise à la Chancellerie pour l’intérêt bien compris du déroulement de carrière !
Aujourd’hui on peut l’affirmer : les libertés publiques sont menacées en France.
Le Président excipe d’un statut quasi régalien pour ester en justice dans des affaires d’offense au chef de l’Etat qui n’ont de justification que dans les pays où précisément le chef de l’Etat est muet car au-dessus des partis ; cela alors que lui-même n’est susceptible d’aucune mise en cause ; bien plus chef de l’exécutif, il pèse sur le fonctionnement même de l’appareil judiciaire et il est donc à la fois juge et partie.
Cas unique dans toutes les démocraties contemporaines et qui apparemment n’émeut qu’une minorité de Français ou de leurs représentants!
Les chiens lâchés n’ont pas tous la rage, mais on n’abat pas tous ceux qui l’ont ; et il faut l’arrestation dans des conditions scandaleuses d’un journaliste pour qu’on réalise que la patrie des Droits de l’homme est beaucoup plus celle des flics impunis et des magistrats arrogants !
On n’imagine sans peine la haine que peut provoquer de tels comportements, insuffisamment sanctionnés puisque, de fait, inhérents à la nature même des politiques mises en œuvre par cette clique réactionnaire et pillarde.
On connaît la délicatesse avec laquelle se pratiquent les interpellations, séquestrations et expulsions de sans-papiers : il n’est pas sûr que la façon dont on traite les journalistes les rassurent beaucoup !
Quant aux indemnités et au « préjudice moral » de Tapie, il suffit de lire le livre de Laurent Mauduit pour comprendre dans quelle république bananière nous vivons désormais.
On s’en prend aux libertés publiques de deux manières : en les vidant de contenu, ou en les contextualisant …
Ainsi le droit de grève est progressivement rogné, ainsi le Code du travail est de moins en moins protecteur du salarié face à son employeur, ainsi les inspecteurs du travail sont-ils moins nombreux et quelquefois offerts en holocauste à des employeurs imbéciles ou criminels.
Les accidents du travail sont minorés, cachés, déniés au grand dam des finances de la sécurité sociale, mais dans ce cas-là la droite n’y trouve rien à redire…
Le statut de la Fonction publique destiné à garantir l’exercice des missions confiées par l’Etat, par des fonctionnaires impartiaux est progressivement miné par l’individualisation des carrières, par le refus des actes collectifs, par le refus du fait syndical quand il n’est pas soumis, et partant de toute démocratie dans le fonctionnement même des administrations de l’Etat ; le principe de libre administration des collectivités territoriales y accentue encore cet affaiblissement, au nom d’une légitimité élective qui n’existe pas et alors même que l’Etat refuse aux élus les moyens d’exercer les responsabilités dont il se décharge sur eux !
Quand le président de la République veut faire du service public de l’audiovisuel la voix de son maître, et non pas la voix de la France comme dit un jour Georges Pompidou, quand il se mêle, au nom d’un populisme empathique avec les familles des victimes, de vouloir réformer les conditions de sortie des malades mentaux en en confiant la responsabilité au préfet, comme sous le roi Louis-Philippe, alors on peut dire que la notion de réforme est en effet dévoyée et la France meurtrie.
Le PS au travail
C’est sur l’ensemble de ces points, que le PS doit travailler, proposer aux Français, se faire entendre, retrouver une crédibilité ; il y aura sans doute 500000 chômeurs de plus dans un an, le pouvoir d’achat des salaires et des retraites est en berne et le gouvernement ne respecte aucun de ses engagements en ces matières ; les réformes qu’il propose, comme le travail le dimanche ou la retraite à 70 ans sont à la fois des leurres et des menaces, mais ne répondent en rien aux besoins du développement des activités économiques du pays ou à la reconstitution d’un excédent commercial.
Ce n’est qu’après cela qu’il sera temps et sérieux de songer à 2012.
JPB
Et dans la foulée:
communiqué de presse de la FSU concernant la Commission Varinard voulant réformer l'ordonnance de 1945 relative aux mineurs.
Le rapport de la commission Varinard chargée par la ministre de la Justice de réformer l'ordonnance de 1945 relative aux mineurs délinquants ne laisse aucun doute sur la volonté de faire disparaître le contenu même de l'ordonnance, à savoir les missions d'éducation et de prévention. Les précautions oratoires consistant à réaffirmer la primauté de l'éducatif et le caractère exceptionnel de l'incarcération sont contredites par un catalogue de mesures qui vont dans le sens inverse, allant jusqu'à proposer l'incarcération d'enfants de 12 ans.
La FSU dénonce ces orientations dont les effets risquent d'être désastreux pour les jeunes et leur éducation ; elle exige le maintien de l'esprit de l'ordonnance de 1945 qui privilégie l'éducation sur la répression avec un service public d'éducation indépendant de l'administration pénitentiaire au sein du ministère de la Justice.. Elle exige notamment le maintien d'une Justice spécifique pour les mineurs séparée de celle des majeurs et de la double compétence civile et pénale de la PJJ, la fermeture des EPM qui font de l'incarcération la réponse privilégiée. Elle demande fermement au gouvernement de ne pas reprendre les conclusions de cette commission.
La FSU sera partie prenante de la mobilisation des personnels de la PJJ contre la casse de leur institution. Elle poursuivra son implication dans les initiatives unitaires. Elle soutient le SNPES-PJJ-FSU dans sa décision de déposer un préavis de grève reconductible pour être en mesure de réagir le plus rapidement possible aux décisions du gouvernement à la suite de ce rapport.
communiqué de presse FSU concernant le plan de relance détaillé par le président de la république ce midi.
Plan de relance : et si on investissait dans l'humain ?
04.12
Le plan de « relance » annoncé par le président de la République à grand renfort de superlatifs, additionne en fait la réaffirmation de décisions déjà prises, des anticipations de paiements , des accélérations d'investissements et des mesures nouvelles.
Outre la disproportion des moyens nouveaux par rapport à ce qui a été engagé pour le secteur bancaire et financier ce plan a comme caractéristiques d'ignorer l'investissement dans les services publics et la situation des salariés et chômeurs.
S'il comporte des mesures ponctuelles et très limitées envers les plus défavorisés, il omet totalement les instruments qui permettraient une politique salariale susceptible de contribuer à une relance de la consommation. Il laisse entières également les questions relatives à la protection sociale et aux minima sociaux. Au contraire il les prive encore plus des ressources nécessaires pour faire face aux besoins.
Se focalisant sur des investissements dans les infrastructures, certes importants, il écarte tout investissement d'avenir dans les fondamentaux que sont les services publics, notamment l'éducation et la recherche, et les hommes et les femmes qui les font vivre.
Alors qu'il souligne que la crise n'est pas conjoncturelle et qu'il insiste sur la demande de « régulation, de protection et de justice » il n'annonce aucune mesure qui permette d'y répondre ; bien au contraire il ouvre de nouveaux champs de déréglementation et il poursuit une politique qui remet en cause le rôle et la place des services publics, y compris en termes de lutte pour l'emploi.
Comment comprendre par exemple que soient maintenues les 30 000 suppressions d'emplois dans la Fonction publique alors que le chômage s'aggrave et que les besoins de formation, de régulation, de sécurité, de santé, de solidarité sont aussi criants ? L'audace véritable aurait sans doute été de rompre avec les dogmes et les a priori en ces domaines.
Dans ce contexte la FSU fera tout pour que les perspectives d'action unitaire interprofessionnelle prévues début 2009 se concrétisent au plus tôt.
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